Xavier Rudd à Saint-Malo : une soirée habitée entre vibrations, héritage et communion
Saint-Malo, 18 octobre. — Porte-voix d’un folk spirituel et multi-instrumentiste de génie, Xavier Rudd continue de tracer loin des modes, une route empreinte de sérénité et de conviction, à l’instar d’Angus & Julia Stone ou de John Butler. Vingt ans après ses débuts, l’Australien reste fidèle à sa mission : célébrer l’unité, la nature et ses racines aborigènes à travers des chansons où la bienveillance côtoie l’engagement.
Cet automne, Rudd faisait escale en France dans le cadre d’une tournée européenne quasi complète — et Saint-Malo n’a pas fait exception. Une heure avant le concert, les premiers fans patientaient déjà devant les portes, impatients de voir ou revoir l’interprète de Follow The Sun. Après son projet ‘Freedom Sessions’, il venait présenter aux fans bretons son dernier EP, ‘Where To Now’, un disque qui prolonge son univers folk-reggae sans le bousculer, mais avec cette sincérité et cette chaleur qui font sa signature.
Finojet, la relève dans les gènes
En première partie, Finojet a su séduire d’emblée. Seul avec sa guitare, à peine vingt ans au compteur, le jeune artiste a livré un set énergique et sincère, oscillant entre folk et pop britannique, évoquant tour à tour Jake Bugg ou The Kooks. Jonglant entre harmonica, pédale de grosse caisse et boucles sonores, le certes jeune mais prometteur chanteur, livre des compositions sincères et entraînantes. Ce n’est qu’à la fin du concert de Xavier que la plupart apprendront que le jeune homme est en réalité… son fils. Un joli clin d’œil familial et musical, tant leur lien artistique semble évident. Comme le dit l’adage : les chiens ne font pas des chats.
Une transe lumineuse
Puis le père entre en scène, salopette blanche, débardeur noir, tatouages apparents, sourire éclatant. Seul face à une salle comble, Xavier Rudd déploie tout son savoir-faire. Guitare, basse, batterie, claviers, didgeridoo, harmonica : il joue de tout, souvent simultanément. Même sans musiciens à ses côtés, son live ne perd absolument pas en intensité. Grâce à des boucles millimétrées, il sculpte des paysages sonores immersifs, riches et puissants, dans lesquels on se laisse volontiers embarquer.


Dès les premières notes de We Deserve To Dream, le silence prend place dans la salle. Le voyage peut commencer. Suivent deux heures d’un concert intense, habité, sans temps mort. Stoney Creek, bouleversante, est dédiée à son chien disparu tandis que Messages, repris en chœur par la foule, se transforme en rituel collectif. Puis viennent les titres plus reggae, Come Let Go ou Flag, où Rudd troque sa guitare pour passer de la basse à la batterie avec une facilité déconcertante pour faire danser le public avant de brandir le drapeau aborigène, symbole de son identité et de son combat. Fidèle à son engagement, il n’oublie pas d’exprimer son soutien au peuple palestinien, salué par une partie seulement du public.
Communion finale
L’un des points culminants du concert est certainement l’interprétation de Culture Bleeding qui le voit jongler entre chant, batterie et didgeridoo — un moment d’une puissance rare. Mais ce sont Spirit Bird et Follow The Sun, ses deux plus grands succès, qui déclenchent la vraie communion : les voix se mêlent, les regards se lèvent, et l’espace d’un instant, tout semble suspendu. Avant de clore la soirée, Rudd serre quelques mains dans les premiers rangs puis interprète The Letter, l’un de ses titres les plus engagés, et invite enfin son fils à le rejoindre pour un duo complice sur Breeze. La boucle semble bouclée, tant on sent dans le regard du père pour qui héritage et transmission sont des thèmes centraux, toute la fierté qu’il porte à son fils.
En quittant la salle, beaucoup avaient les yeux encore brillants. Xavier Rudd n’a pas seulement donné un concert : il a offert une expérience d’humanité et de connexion, rappelant qu’en des temps troublés, la musique peut toujours réunir.